Micronutrition et Maladies Chroniques de la Surface Oculaire
Introduction
Les maladies chroniques de la surface oculaire comprennent deux grands groupes de symptômes : les inflammations chroniques, quelle que soit leur origine (allergies, blépharites, maladies inflammatoires ayant une spécificité immunologique ou non) et les sécheresses oculaires, qui ont aussi une composante inflammatoire. Pourquoi les sécheresses et pas la sécheresse ? Car il existe plusieurs types de sécheresses oculaires. Celles en lien avec un excès d’évaporation des larmes et celles en lien avec un manque de débit des larmes, manque qui peut être primaire (insuffisance de sécrétion des larmes par la glande lacrymale) ou secondaire à une hypoesthésie par exemple ou toute autre altération de l’arc réflexe responsable de la sécrétion continue des larmes.
Quand il existe une inflammation de la surface, elle peut-être primaire, en lien avec une immunité non régulée (allergie ou auto-immunité) ou avec une altération de la qualité des larmes qui deviennent biochimiquement inflammatoires (larmes acides, larmes riches en cytokines ou prostaglandines, larmes ayant une osmolarité augmentée et créant un flux osmotique depuis le cytoplasme des cellules épithéliales, larmes ayant une couche lipidique altérée induisant une évaporation excessive et un frottement « irritant » marqué des paupières par manque d’une couche de glissement, larmes ne protégeant plus la surface oculaire par leur absence, avec comme conséquence un « collage » augmenté des particules environnementales sur la muqueuse oculaire induisant une irritation chronique). L’ensemble de ces altérations fait le lit de l’inflammation chronique. Concernant la composition biochimique des larmes, j’ai pour habitude de dire à mes patients touchés par un problème de larmes que « leurs larmes ne tombent pas du ciel » et que leur composition est le résultat d’un processus complexe initié dans leur alimentation : manière dont leur alimentation est transformée par leur tube digestif et les 2 ou 2,5 kg de bactéries composant leur microbiote, véritable « organe » qui vit en symbiose avec nous et qui conditionne la façon dont les aliments passent la muqueuse digestive; la manière dont les aliments sont filtrés et transformés par le foie, sécrétés dans le flux sanguin pour enfin nourrir les tissus et les organes composant notre organisme. Cette belle mécanique peut dysfonctionner à différents niveaux et modifier la composition de nos larmes.
Si c’est le cas, les traitements locaux peuvent traiter les symptômes mais si nous avons le courage de vraiment regarder les résultats obtenus au long cours grâce aux traitements que nous proposons à nos patients présentant une maladie chronique de la surface oculaire : ils ne sont pas très convaincants. Ces patients sont des patients chroniques qui viennent et reviennent à nos consultations durant plusieurs années car nous traitons leurs symptômes mais nous ne les guérissons pas.
Conscient de ces limites et que les épithéliums de la surface oculaire changent leur différenciation terminale parce que leur microenvironnement se modifie, c’est-à-dire le milieu dans lequel les cellules épithéliales prolifèrent et se différencient (résultats de travaux des laboratoires des Pr Danielle Dhouailly et Yann Barrandon), je me suis naturellement intéressé à la modification de l’environnement dans lequel baignent les cellules épithéliales de la surface oculaire, et à l’étude de l’impact de l’alimentation, de la nutrition et de la micronutrition sur les maladies de la surface oculaire.
Pourquoi parler de nutrition ou de micronutrition pour traiter les maladies de la surface oculaire ?
La première question qui vient à l’esprit est : qu’est-ce que la micronutrition ? Les aliments que nous mangeons et qui nous nourrissent sont constitués de macronutriments qui représentent l’essentiel de leur masse (lipides, glucides et protéines), et de micronutriments présents en très petite quantité et qui sont indispensables au bon fonctionnement de notre organisme ; ce sont les minéraux, les vitamines, les oligoéléments, les métaux, les acides gras essentiels, les acides aminés essentiels… La micronutrition a pour objectif d’étudier l’impact de ces micronutriments sur notre santé. Mais elle recherche aussi les aliments pouvant « irriter » notre organisme et modifier notre flore digestive ou notre microbiote. Si notre flore est saine et équilibrée, elle nous nourrira au mieux pour que nous soyons en pleine santé ; si elle est altérée, dégradée, dysfonctionnelle, elle nous nourrira de manière dysfonctionnelle, insuffisante et nous rendra malades. Elle pourra conduire, par exemple, à augmenter la perméabilité de notre tube digestif, et plus particulièrement de l’intestin grêle, et créera un syndrome appelé par les Anglo-Saxons « Leaky Gut Syndrom » ou syndrome de perméabilité intestinale.
Dans ce syndrome, le filtre digestif devient trop perméable et laisse passer des peptides qui devraient rester dans la lumière du tube digestif. Ces protéines anormalement présentes dans le flux sanguin sont une source supplémentaire d’antigènes, ce sont aussi des fragments de bactéries (antigènes LPS, par exemple) ou de champignons et bien d’autres composants de notre flore digestive que notre organisme doit fragmenter, métaboliser et identifier… [1]. Ce syndrome serait à l’origine de nombreuses pathologies inflammatoires chroniques et expliquerait une grande partie du syndrome métabolique ou cardiométabolique [2]. D’une manière plus surprenante, la flore digestive pourrait « parler » à travers notre organisme et guider nos appétences alimentaires. Par exemple, une flore digestive riche en Candida albicans a une appétence plus importante pour le sucre et manger du sucre pour le porteur d’une telle flore donnerait une sensation de satiété. Ainsi, nos envies pourraient ne pas être totalement les nôtres mais en partie celles de notre flore digestive. Comprendre un tel mécanisme nous ouvre à d’autres compréhensions et nous montre l’importance de bien « cultiver » notre flore digestive en mangeant ce qui nous correspond au niveau individuel.
Si notre organisme manque de micronutriments, certaines fonctions seront progressivement dégradées et avec le temps, ces carences participeront à la genèse de nombreuses maladies. Il est important de comprendre que toute inflammation chronique « surconsommera » les éléments de base que sont les micronutriments, et malgré une impression de « bien manger », des carences pourront s’installer avec leurs manifestations physiopathologiques.
Selon la Société Suisse de Micronutrition (SSM), les trois grands objectifs de la micronutrition sont :
maintenir l’équilibre de l’écosystème intestinal ;
protéger les cellules de notre organisme des agressions extérieures et du vieillissement à l’aide de « protecteurs cellulaires » ;
limiter les déficits en micronutriments secondaires à notre mode de vie et la manière de nous alimenter, en utilisant des compléments nutritionnels et supplémenter si besoin en micronutriments manquant.
Finalement cette introduction pose la problématique de l’impact d’une anomalie biologique systémique, ou touchant l’ensemble de notre organisme, sur nos yeux et particulièrement sur la surface de nos yeux.
Nous sommes des spécialistes en ophtalmologie, nous savons traiter nos patients grâce à notre formation, aux compagnonnages dont nous avons bénéficié, aux sociétés scientifiques auxquelles nous appartenons, aux enseignements qu’elles organisent et aux « guidelines » qu’elles formulent et, surtout, grâce à notre pratique de tous les jours et à la prise en charge de nos patients. Nous apprenons aussi grâce aux suivis que nous réalisons de longue date et qui nous ont permis d’évaluer la pertinence et l’efficience de nos actions. Si nous sommes confiants dans nos actions et nos observations cliniques, nous apprenons de celles-ci et créons notre propre réalité fondée sur notre expérience qui nous conduit à envisager d’autres stratégies.
En traitant depuis de nombreuses années des maladies chroniques de la surface oculaire, et si nous ne nous mentons pas, nous constatons un relatif échec (voire plus) dans la prise en charge de ces maladies. Nous avons l’impression de « tourner en rond » avec tous ces patients qui viennent et reviennent dans nos consultations et pour qui nous avons testé l’ensemble des propositions thérapeutiques disponibles. Si l’on est prêt à regarder notre pratique avec lucidité, nous savons que dans ces pathologies chroniques de la surface oculaire nous traitons les symptômes et nous n’abordons pas le fond du problème. Alors une conviction apparaît doucement : il existe d’autres clés de compréhension pour aborder ce type de patients.
Je n’aurai pas la prétention, dans cet article, d’envisager une méthode qui pourrait guérir les patients touchés par ce type de pathologie – les sécheresses des muqueuses étant une des pathologies chroniques très difficiles à guérir –, mais plutôt d’avancer sur le chemin qui tend vers ce but en partageant avec vous ma manière d’envisager ces pathologies et les fondements de mon attitude. Aujourd’hui, je collige les résultats que j’ai pu obtenir en envisageant ces patients d’une manière plus globale ; je peux dire qu’il n’existe pas de formule toute faite, mais que chaque patient nécessitera une prise en charge singulière.
Quel est le rationnel scientifique et/ou biologique qui fonde une démarche utilisant la micronutrition pour améliorer la qualité des épihéliums qui recouvrent notre surface oculaire ?
Les cellules épithéliales sont en renouvellement constant, elles sont une « usine » biochimique et une couche de protection de la surface oculaire.
La surface oculaire est recouverte de deux épithéliums, l’épithélium conjonctival et l’épithélium de la cornée [3]. Le premier est constitué d’un deuxième type de cellules appelées cellules à mucus qui permettent de sécréter un des composants du film lacrymal. L’épithélium de la cornée est un élément clé de la vision car son bon fonctionnement est absolument nécessaire à une bonne vision.
La compréhension du renouvellement de l’épithélium de la cornée a généré d’intenses recherches durant les quarante dernières années et plusieurs modèles de renouvellement se sont succédés. Le modèle actuellement utilisé repose sur le dogme des cellules souches au limbe [4-7] (figure 1). Le dogme admis aujourd’hui est que toutes les cellules souches épithéliales de la cornée, toutes sans exception, sont issues du limbe et de ses cryptes. En d’autres termes, sans cellules souches au limbe, pas de cornée normale. Ce modèle a permis des avancées importantes dans la prise en charge des patients présentant une destruction de la surface oculaire. Il a aussi conduit à limiter la compréhension de la surface oculaire, car la différenciation normale de l’épithélium de la cornée n’est pas uniquement un problème de cellules souches mais est liée à l’environnement de l’état biochimique de la surface oculaire.
Après dix années de travail avec le Pr Yann Barrandon, nous avions proposé en 2008, grâce aux résultats de nos recherches sur six types de mammifères, dont l’homme, qu’il existait des cellules souches épithéliales sur l’ensemble de la surface oculaire, dont la cornée centrale, et que la différenciation terminale des épithéliums de la surface oculaire était contrôlée par l’environnement biochimique dans lequel les cellules se renouvelaient (qualité des larmes et de la matrice ou stroma cornéen) [8]. La conséquence d’un tel modèle est que, pour modifier la différenciation terminale ou reconstruire une surface oculaire détruite, il faut aussi et surtout agir sur la composition biochimique de la surface oculaire (figure 1) et pas uniquement sur le manque de cellules épithéliales et de cellules souches épithéliales.
Mon intérêt pour la micronutrition est une des conséquences de ce modèle.
Figure 1. Histoire du renouvellement de l’épithélium de la cornée.
Depuis la moitié du siècle précédent, plusieurs modèles de renouvellement ont été proposés. Aujourd’hui, le modèle retenu dans les textbooks est fondé sur la localisation, sans exceptions, de toutes les cellules souches épithéliales de la cornée au limbe. Leur déficience ou leur absence expliquerait le changement de différenciation terminale de l’épithélium de la cornée. Dans ce modèle, l’environnement dans lequel les cellules épithéliales de la cornée évoluent (composition biochimique des larmes et de la matrice, inflammation) n’aurait qu’une importance accessoire.
Avec le Pr Yann Barrandon, et après dix années de travail en recherche fondamentale, nous avons proposé un autre modèle dans lequel l’environnement est l’élément clé et son équilibre homéostasique absolument nécessaire pour permettre une différenciation normale des épithéliums de la surface oculaire.
Dans ce modèle, l’épithélium de la cornée ne peut pas être normal si la matrice ou le stroma cornéen sont anormaux et/ ou si la composition biochimique des larmes est anormale. En d’autres termes, la différenciation terminale des cellules épithéliales cornéennes est le produit de l’équilibre de cet environnement.
Figure 2. Différenciation normale des épithélums
Différenciation terminale normale de l’épithélium de la peau ou épiderme, de la conjonctive et de la cornée.
La différenciation terminale des cellules épithéliales dépend plus de l’environnement dans lequel elles évoluent (« leur milieu de culture ») que des gènes qui les constituent et qu’elles expriment. En d’autres termes, la différenciation terminale des cellules épithéliales est le résultat de l’interaction des cellules de la surface oculaire avec le milieu biochimique dans lequel elles évoluent
Ferraris et al. avaient montré que l’épithélium adulte de la cornée centrale de lapin pouvait se différencier en peau après une induction (ou mise en contact biologique) par des cellules embryonnaires de souris d’origine cutanée [9]. Ce résultat a été confirmé par des travaux réalisés dans le laboratoire du Pr Barrandon. Il s’agit d’un résultat clé de biologie cellulaire et de biologie de la surface oculaire. Il nous dit qu’un épithélium adulte que nous pensions définitivement déterminé avec une faible capacité de transformation peut s’adapter à son environnement biochimique et changer sa différenciation terminale. Si des expériences de laboratoire peuvent réaliser cette prouesse, existe-t-il des situations cliniques dans lesquelles nous pouvons observer ce processus étonnant ?
Dans notre pratique de tous les jours, nous observons des changements de différenciation terminale des épithéliums de la surface oculaire (figures 2 et 3). Si une inflammation chronique de la surface oculaire est présente, la cornée peut se transformer en conjonctive (conjonctivalisation de la cornée), et s’il existe de manière associée une sécheresse oculaire importante, l’épithélium de la cornée prend les attributs de l’épiderme ou épithélium de la peau, la cornée et ou la conjonctive peuvent se kératiniser (figure 3). Si l’inflammation chronique se prolonge durant plusieurs années, une carcinogenèse peut apparaître, particulièrement dans les zones de la surface oculaire ayant des cellules épithéliales à cycle lent, comme le limbe ou le bord des paupières (figure 4). Il est à noter que des carcinomes in situ sont parfois aussi observés si l’on réalise l’examen anatomopathologique d’un ptérygion, qui est la résultante d’une inflammation chronique secondaire à une exposition répétée aux UV, à la chaleur, au vent et à la poussière.
Figure 3. Différenciation terminale anormale de l’épithélium de la cornée.
Conjonctivalisation de la cornée : l’épithélium de la cornée a les caractéristiques de la conjonctive. Selon le modèle actuel qui explique le renouvellement de l’épithélium de la cornée, l’absence de cellules souches au limbe explique ce changement de phénotype. Comme le « réservoir » en cellules épithéliales de la cornée est vide, la conjonctive prend sa place. Selon notre modèle (figure 1), la cornée devient de la conjonctive car le stroma cornéen superficiel et/ou profond est néovascularisé et une inflammation chronique de la surface oculaire est présente ou a été présente. Kératinisation de la cornée : l’épithélium de la cornée se transforme en épiderme et devient squameux. Dans ce cas, le modèle de renouvellement de l’épithélium de la cornée avec les cellules souches au limbe n’explique pas ce changement de différenciation par un déficit en cellules souches mais par une sécheresse. Selon notre modèle, une telle situation est expliquée par une modification du microenvironnement local associant inflammation chronique de la surface oculaire, sécheresse oculaire et/ou un déficit en vitamine A par exemple. Il s’agit clairement selon nous d’un changement d’environnement de la surface.
Figure 4. Différenciation anormale ou changement de phénotype de la cornée
Tableau synthétique pour expliquer les différentes voies possibles de différenciations terminales de l’épithélium de la cornée si celui-ci est exposé à un stress biologique chronique.
Selon ces informations, on comprend aisément l’intérêt de modifier le microenvironnement biochimique dans lequel les cellules épithéliales se multiplient et évoluent. On comprend aussi qu’il est important de réguler l’inflammation chronique qui est une « force » biochimique pouvant conduire à la métaplasie d’un épithélium, voire à une carcinogenèse (chez l’homme, 80 % des cancers sont d’origine épithéliale).
La nutrition et la micronutrition sont une des voies possibles pour changer la biochimie de la surface oculaire. Conclusion : la différenciation terminale des cellules qui constituent les épithéliums qui recouvrent notre surface oculaire est régulée par le milieu
Les larmes qui coulent de nos yeux « ne tombent pas du ciel » mais sont un des « produits terminaux » de sécrétion de notre organisme et, de ce fait, un reflet indirect du fonctionnement biochimique de notre organisme
Ces dernières années, de nombreuses publications ont fait le lien entre les altérations du microbiote intestinal et un grand nombre de maladies touchant spécifiquement des organes ou des maladies auto-immunes [2,10-12].
Une étude récente montre que l’augmentation de la perméabilité intestinale est associée au syndrome de Sjögren primaire et à la sclérose en plaques [1]. Cette étude relie l’inflammation intestinale avec l’augmentation de la calprotectine fécale et à l’augmentation de la perméabilité membranaire digestive évaluée par les tests d’absorption intestinale du mannitol et du lactose. L’inflammation intestinale et l’augmentation de la perméabilité intestinale sont associées au syndrome de Sjögren. De tels résultats ouvrent définitivement de nouvelles voies dans la compréhension des maladies chroniques de la surface oculaire.
La difficulté de ce type d’approche est que la réponse n’est pas unique. Un seul traitement ou un seul protocole ne permet pas de régler l’ensemble du problème, sinon cela serait connu et la question de la sécheresse oculaire (un des gros business des gouttes pour les pharmas, en Suisse trois millions de prescriptions par année pour huit millions d’habitants) serait définitivement réglée.
La méthode scientifique classique que nous utilisons, qui compare des groupes et tente de rendre binaire un problème complexe, est mise à mal car il s’agit plus d’un parcours de soins que d’appliquer la même recette pour tous les patients. Lors de notre prise en charge, en plus du traitement local, il est nécessaire d’envisager la prescription de compléments alimentaires comme des oméga-6, qui jouent un rôle majeur sur le plan cutané et au niveau des muqueuses (même si nous sommes déficients en oméga-3 dans un plus grand nombre de cas). J’associe aussi pour ces patients une prescription per os de vitamine E et de calandula (souci officinal) en teinture mère qui a une action antioxydante, cicatrisante et anti-inflammatoire. Dans cette approche, tous les produits utilisés doivent être naturels et sans conservateurs. Si nous ne suivons pas cette règle, la présence d’un irritant chronique sur la surface oculaire risque de pérenniser l’inflammation chronique que nous souhaitons traiter.
Micronutrition et maladies de la surface oculaire : quelles applications aujourd’hui ?
En ophtalmologie, les compléments alimentaires sont utilisés depuis de nombreuses années [13]. L’objectif recherché est un effet antioxydant. La cataracte, dont l’origine principale est un vieillissement du cristallin lié à l’âge, est la conséquence d’un stress oxydant chronique comme la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Selon ces informations, lutter contre le stress oxydant apparaît comme un des objectifs du traitement préventif.
Utilisation des compléments alimentaires en ophtalmologie
DMLA
Pour limiter l’évolution de cette maladie on utilise la lutéine, la zéaxanthine, les vitamines C et E comme antioxydants, le zinc et le cuivre comme cofacteurs des réactions enzymatiques, pour rééquilibrer les déficits en acides gras essentiels des oméga-3 (EPA et DHA), et on peut aussi prescrire des extraits de vigne (Vitis vinifera). L’étude AREDS 2 compare quatre groupes présentant une DMLA, dont un groupe avec un placebo, un avec une supplémentation en oméga-3 (DHA et EPA), un avec une supplémentation en lutéine et zéaxanthin, et un associant l’ensemble des suppléments alimentaires. Quel que soit le groupe, il n’existe pas de ralentissement de l’évolution des DMLA avancées [14,15].
Une des premières études fondées sur un groupe représentatif de patients est la Blue Mountains Eye Study. Il s’agissait d’une étude transversale comparant des DMLA précoces et tardives avec la prise d’une diète antioxydante [16]. Aucune différence significative n’avait été retrouvée dans les groupes avec compléments alimentaires et ceux sans compléments.
Une étude Cochrane récente rapporte une insuffisance de preuves concernant un effet préventif ou stabilisant si les patients présentant une DMLA bénéficient d’une prescription d’oméga-3, d’antioxydants, de vitamines et de compléments alimentaires [17].
La lecture de la littérature permet de conclure à une absence de consensus, car en utilisant la méthodologie scientifique médicale classique qui compare plusieurs groupes, la force de la preuve n’est pas apportée. Et pourtant, les compléments alimentaires sont prescrits à grande échelle pour prévenir ou limiter l’évolution de la DMLA. Pourquoi ? Parce qu’il existe une logique biochimique qui supporte cette pratique : lutter contre le stress oxydant et l’inflammation de bas grade [18]. De plus, un nombre non négligeable de patients, plutôt que de rentrer chez eux en attendant la perte éventuelle de leur vision centrale, souhaite agir et ne pas rester passifs, ce que nous pouvons comprendre. Prescrire des compléments alimentaires est alors une des options possibles.
D’autres auteurs évoquent le rôle possible de la dysbiose de la muqueuse buccale dans l’inflammation chronique locorégionale, dont les yeux et la progression de la DMLA [19]. Comme on le voit, les liens entre flores bactériennes présentes dans notre corps et à sa surface, et la genèse de l’inflammation chronique de bas grade impliquée dans l’évolution de nombreuses maladies sont de plus en plus discutés. Ce constat est un argument supplémentaire fort pour s’intéresser à la micronutrition, moyen d’appréhender les carences éventuelles chez un patient, la manière dont il se nourrit, qui est une façon indirecte de maintenir un microbiote de qualité et de préserver sa santé.
Cataracte
Une diète riche en antioxydants provenant d’aliments comme les fruits ou les légumes semble avoir un rôle protecteur en limitant le développement des maladies suivantes : cancers épithéliaux, pathologies cardiovasculaires, DMLA, cataracte et asthme [20]. L’action antioxydante de la vitamine E et son intérêt dans les pathologies suscitées est évoquée mais aucun consensus n’est établi. La lutéine et la zéaxanthine ont des propriétés antioxydantes. Elles sont présentes au niveau du pigment jaune de la rétine, qui est particulièrement concentré au niveau de la macula, et c’est ce qui explique leur rôle clé dans la DMLA. Leur déficit pourrait aussi jouer un rôle dans le développement de la cataracte sénile et supplémenter un patient présentant un déficit aurait dans ce cas une légitimité [21]. Les polyphénols comme le resvératrol auraient aussi un rôle protecteur du cristallin et retarderaient le développement de la cataracte [22].
Uvéites et axe occulo-digestif
Les uvéites non infectieuses sont considérées comme des maladies auto-immunes et des études récentes ont étudié le lien possible entre ces pathologies et la dérégulation du microbiome intestinal. Dusek et al. ont testé avec succès l’effet immunomodulateur, et donc favorable, de deux probiotiques (Escherichia coli Nissle 1917 [EcN] et E. coli O83 :k24 :H31 [EcO]) dans un modèle murin d’uvéite auto-immune expérimentale (EAU) [23].
Surface oculaire, yeux secs et dysfonction des glandes de Meibomius
Cela est connu de tous, les déficits en vitamine A ont des conséquences directes sur l’épithélium conjonctival en diminuant la sécrétion de mucines, qui est un élément fondamental pour la stabilité du film lacrymal [24]. Par ailleurs, la vitamine A est un élément clé pour maintenir la trophicité des épithéliums.
L’amélioration des symptômes liés à la sécheresse oculaire par la prise d’antioxydants oraux [25] est secondaire à l’amélioration de la stabilité du film lacrymal et à l’amélioration de la qualité de l’épithélium conjonctival.
L’altération du microbiote intestinal est associée à de nombreuses pathologies auto-immunes, dont le syndrome de Gougerot-Sjögren primaire [11]. Dans cette étude, les auteurs retrouvent un lien entre dysbiose et syndrome de Gougerot-Sjögren tant au niveau clinique que biologique, avec des signes d’inflammation gastro-intestinale (augmentation de calprotectine fécale). Dans un modèle murin de sécheresse oculaire, la prise du probiotique IRT5 améliore le microbiote intestinal et augmente de manière indirecte le débit de sécrétion des larmes. Il semble que le microbiote intestinal pourrait agir de manière indirecte sur les glandes lacrymales en régulant un processus inflammatoire systémique [26].
Ce résultat est confirmé et est précisé par l’étude de Yun et al. [27] qui montre que le microbiote intestinal peut moduler le ratio entre les cytokines pro-inflammatoires, comme le TNF-alpha, et les cytokines anti-inflammatoires, comme l’IL-10. Chez la souris, le volume des larmes est directement amélioré avec la prise de probiotiques anti-inflammatoires, contenant des Lactobacillus plantarum NK151 et du Bifidobacterium bifidum NK175.
D’autres auteurs ont imaginé d’instiller un mélange de bactéries au niveau des larmes pour améliorer la flore locale. Le mélange utilisé comprenait le Saccharomyces boulardii et l’Enterococcus faecium. Il s’agissait d’une étude transversale et le groupe au bénéfice des probiotiques lacrymaux a montré une amélioration du Schirmer I et II, ainsi que du Break-Up Time [28]. Un résultat comparable a été obtenu avec une supplémentation par Bifidobacterium lactis et Bifidobacterium bifido [28].
Rôle du microbiote intestinal et de l’axe entero-oculaire
Shivaji et al. ont étudié le lien existant entre la modification du microbiote au niveau intestinal et certaines maladies extradigestives, avec un focus particulier sur les maladies oculaires suivantes : kératites bactériennes et fongiques, uvéites, dégénérescence maculaire liée à l’âge et pathologies touchant la muqueuse ou la surface oculaire. Il apparaît qu’un lien semble exister entre anomalies du microbiote intestinal et certaines pathologies oculaires, mais des études supplémentaires seront nécessaires [29-31].
La notion de « Gut-Eye-Lacrimal Gland-Microbiome » est discutée par Trujillo-Vargas. Cette étude montre le rôle protecteur d’une flore digestive saine dans le bon fonctionnement de la surface oculaire et dans sa bonne « santé » [32]. L’utilisation d’une antibiothérapie systémique ou d’un modèle de « Germ Mice Free » a permis une mise en corrélation de la qualité de la surface oculaire avec la modification du microbiote intestinal dans ces deux situations expérimentales.
Utiliser la micronutrition pour aborder des maladies chroniques de la surface oculaire
Si l’on aborde un patient sur le plan micronutritionnel, et si l’on suit la méthode préconisée par la SSM et l’Institut européen de diététique et de micronutrition (IEDM) basé à Paris, des questionnaires sont envoyés par e-mail avant la consultation. Deux questionnaires principaux sont adressés : le premier concerne la manière dont le patient se nourrit (le QAF ou questionnaire alimentaire fonctionnel) et un questionnaire de santé (ou QMS pour questionnaire médical de santé) (figure 5). Chacun évalue le patient selon cinq grands axes : la protection cellulaire, la communication cellulaire, la fonction digestive, la fonction cerveau et la fonction cardiométabolique. Ces cinq grands axes sont abordés du côté prise alimentaire et du côté état de santé. Grâce à ces questionnaires, les erreurs alimentaires manifestes sont détectées et le terrain du patient est appréhendé.
Après avoir utilisé cette méthode avec plusieurs patients, il est étonnant de constater que certains d’entre eux se nourrissent plutôt bien et présentent pourtant un syndrome métabolique ou des maladies chroniques. Pourquoi ? Parce que leur microbiote a été modifié. Le microbiote de ces patients est devenu anormal plusieurs années auparavant à la suite d’un déséquilibre alimentaire prolongé, de la prise récurrente d’antibiotiques sans correction post-traitement par des probiotiques, ou d’un stress chronique qui peut en quelques semaines transformer définitivement le microbiote. Les causes de modifications du microbiote sont nombreuses et ne sont probablement pas toutes identifiées à ce jour. Pour ces patients, malgré une nourriture mieux adaptée, leur microbiote n’a pas retrouvé son état normal et ne leur permet donc pas de bénéficier de sa bonne alimentation.
Si l’on demande à un patient s’il se nourrit bien, il vous répondra oui dans 80% des cas. Les questionnaires permettent de mettre en lumière cette opposition.
Figure 5.
Questionnaires de micronutrition
https://www.ssm-sgm.ch/page/questionnaires Questionnaires adressés au patient avant une consultation de micronutrition. Il existe un questionnaire qui interroge le patient sur sa manière de se nourrir : le QAF, pour questionnaire alimentaire fonctionnel. Le deuxième questionnaire est le QMS, pour questionnaire médical de santé, qui, comme son nom l’indique, évaluera l’état de santé général du patient. Il est intéressant de constater que si vous demandez à quelqu’un s’il s’alimente bien, il vous répondra oui dans 80 % des cas. Et pourtant, bien souvent le patient est devant vous car il présente une maladie qui le conduit à consulter. Si on est d’accord avec le fait que la manière de nous alimenter est un élément clé dans la genèse des maladies (« Que ton aliment soit ta seule médecine », Hippocrate), cela peut vouloir dire deux choses : soit le patient ne se rend pas compte qu’il s’alimente mal, soit, malgré une alimentation de qualité, le bénéfice de cette juste attitude n’est pas obtenu au niveau homéostasique. Pourquoi ? Car le terrain de ce patient présente des déficits multiples et/ou son microbiote est altéré.
Comment mettre en pratique une telle approche ?
Nos journées déjà chargées par notre pratique quotidienne ne nous permettent pas, sauf choix personnel, de prendre en charge nos patients selon cette méthode. Une première consultation de micronutrition dure en moyenne 60 minutes. Quand organiser une telle activité dans une pratique déjà surchargée ?
Pour mettre en œuvre cette méthode, il est nécessaire d’être convaincu de cette manière d’aborder un patient touché par une maladie chronique de la surface oculaire, mais plus que cela, il faut faire partie d’un réseau de soins capable d’assumer une telle approche.
Se former dans le domaine de la micronutrition : en France, la pratique de la micronutrition se développe depuis de nombreuses années, avec la possibilité pour les médecins intéressés ou les soignants de toute origine, de suivre des Diplômes d’études approfondies (DES) de haut niveau. À partir des années 1990, de nombreux médecins ont collaboré avec des nutritionnistes et des biologistes, et des chercheurs issus de plusieurs horizons ont uni leurs connaissances spécifiques en lien avec la diététique, les compléments alimentaires, le microbiote et l’écosystème intestinal. Le concept de micronutrition a ainsi été formulé et a conduit à la création en 1997 de l’IEDM, actuellement présidé par le Dr Didier Chos. Le monde du sport de haut niveau est aussi très intéressé par cette manière de faire et en France, le Dr Denis Riché, ancien sportif de haut niveau, a été l’un des promoteurs de cette approche qu’il a utilisée pour aider des équipes devant participer aux Jeux olympiques.
Des bilans sanguins à la recherche de dysfonctionnements ou de déficits multiples en rapport avec la micronutrition sont organisés selon plusieurs chapitres : maladies cardiovasculaires et inflammation, stress oxydant et nutrition, allergies et intolérance, statut endocrinien, écosystème intestinal, neurologie et psychiatrie, statut gynécologique, dermatologique, bilan infectieux et recherche de marqueurs oncologiques.
Docteur, je viens vous voir pour mes yeux et vous me parlez de digestion et de micronutrition ? Changer le narratif et expliquer au patient le lien entre son alimentation, l’altération de son microbiote et de la perméabilisation de la paroi du tube digestif entraînant une inflammation chronique de bas grade, pouvant être à l’origine des maladies auto-immunes à manifestation ophtalmologique comme une sécheresse oculaire ou une inflammation de la surface oculaire. Ce mécanisme n’explique évidemment pas toutes les inflammations de la surface oculaire mais il est un des éléments clés.
Il est possible de prescrire un traitement per os non spécifique associé à un traitement local. J’ai pour ma part une ordonnance type que je donne au patient lors d’une prise en charge, puis avec le temps j’aborde la complexité d’une telle prise en charge.
Il est possible de conseiller un régime alimentaire OFF/ON avec exclusion d’un aliment spécifique comme le gluten (pro-inflammatoire) [33], les laitages (engluants et acidifiants) ou les sucres de synthèse (acidifiants et impactant fortement la flore digestive). Concernant le gluten, nous connaissons la maladie coeliaque qui est clairement identifiée par la présence d’anticorps anti-transglutaminase, mais nous connaissons moins les manifestations extra-intestinales de la sensibilité au gluten non coeliaque [33]. Parmi les maladies identifiées, le syndrome de Sjögren est listé dans les pathologies qui pourraient bénéficier d’un arrêt du gluten. Selon l’article cité, la force de la preuve est de niveau 4 sur l’échelle d’Oxford allant de 1 à 4 ; 1 étant la force de la preuve la plus élevée.
Figure 6. Pourquoi parler de micronutrition en ophtalmologie ? comprendre les liens
Comprendre le lien entre micronutrition, microbiote, inflammation chronique ou stress oxydant chronique et anomalie de différenciation terminale des épithéliums de la surface oculaire.
Il s’agit d’une notion peu développée qui pourrait pourtant intéresser d’autres spécialités médicales car l’épithélium de la surface oculaire est une muqueuse comme l’épithélium oropharyngé, pulmonaire, digestif, gynécologique et urologique. Par ailleurs, la peau, qui est l’organe le plus lourd de notre organisme, est recouverte d’un épithélium appelé épiderme. Un tel modèle pourrait apporter des éléments de compréhension dans d’autres spécialités car 80 % des cancers sont d’origine épithéliale.
Conclusion
Cet article a pour objectif de réunir ou de relier plusieurs pièces du « puzzle » que constitue la prise en charge globale des maladies chroniques de la surface oculaire. Connecter différenciation normale et anormale des épithéliums de la surface oculaire avec inflammation chronique et stress oxydant est un premier lien. Puis lier inflammation chronique de bas grade ou stress oxydant avec modification de la flore digestive ou microbiote est une deuxième association pas forcément « évidente ». Enfin, relier la modification de la flore digestive et la correction de celle-ci par une approche fondée sur une logique de micronutrition constitue une dernière clé de compréhension (figure 6). Ces trois clés permettent ensemble une approche globale partant de la micronutrition pour modifier in fine l’environnement biochimique des cellules épithéliales de la surface oculaire. Une fois cette complexité envisagée et comprise, une telle approche prend tout son sens et devient avec le temps incontournable.
J’entends déjà des commentaires légitimes : « Tout cela est bien joli ! Mais comment en faire du réel ? »
Sur le plan pratique, nous sommes d’abord ophtalmologues, notre temps est compté et il n’est pas possible de réaliser seul une prise en charge globale. Il est donc nécessaire, si cette manière de faire vous interpelle, de rejoindre un réseau de soins convaincu par cette approche. En reconsidérant le patient différemment et d’une manière plus globale, dans le cas des pathologies chroniques, j’ai eu l’impression de retrouver un des intérêts qui m’avaient fait choisir l’ophtalmologie : être médecin et chirurgien. En effet, ce type d’approche très médicale nous demande de nous replonger dans de nombreux domaines, telles la nutrition et la micronutrition en passant par la diététique, la chimie, la biochimie et la biologie cellulaire.
Dans ma pratique, je ne propose évidemment pas ce type d’approche à tous mes patients mais seulement à ceux présentant une pathologie chronique et seulement après un suivi prolongé. Je collige depuis plusieurs années les patients rapportant une amélioration de leur qualité de vie lors de traitements associant un traitement local et une supplémentation systémique ou un régime d’exclusion. Certains patients ont observé des améliorations importantes alors que d’autres n’ont pas noté d’amélioration(s) particulière(s). Il est clair qu’il n’existe pas de recettes applicables à tous. Il existe en revanche des clés de compréhension qui permettent de proposer une stratégie pour chaque patient.
Chercher à améliorer la santé du patient est une démarche beaucoup plus hasardeuse que chercher à traiter les symptômes d’une maladie chronique et non à la guérir. Cependant, les deux approches ne sont pas opposées, elles se complètent. Traiter un symptôme aidera nos patients à court terme mais ne permettra pas une guérison au long terme. Aborder la guérison, c’est chercher à améliorer la santé de son patient et c’est finalement se confronter à une complexité qui nécessite une succession de propositions thérapeutiques dont l’ordre est particulier et dépend de chaque patient. Nous pourrions dire que nous ne sommes pas formés à ce type d’approche qui donne pourtant dans certains cas des résultats étonnants.
Dans mon expérience, les patients sont très reconnaissants de cette opportunité d’être suivis par un spécialiste qui connaît son domaine et qui est ouvert à une prise en charge différente de ces pathologies chroniques qui impactent grandement et au long cours leur qualité de vie.
À mon sens, la médecine de demain devrait envisager les possibles associations de connaissances provenant de plusieurs champs de savoir, avec comme objectif l’amélioration du fonctionnement chimique et biochimique du patient. Cette manière d’envisager les maladies chroniques de la surface oculaire correspond aux trois liens proposés dans cet article. Relier la différenciation terminale des épithéliums de la surface oculaire avec l’inflammation chronique, elle-même conséquence d’un dysfonctionnement du microbiote qui peut être en partie corrigé par une approche thérapeutique fondée sur la micronutrition.
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Revue de l'ACOS - Association des centres de l'oeil sec